Quand le juge constitutionnel allemand encadre la confiance mutuelle : réflexions sur le juge européen des droits fondamentaux

par Marguerite Guiresse, CDRE

L’avis 2/13 rendu par la CJUE avait fait effet de tremblement de terre par la brutalité de son refus du projet d’adhésion de l’Union européenne à la CEDH. Il avait surpris presque autant par sa magistrale démonstration juridique rappelant le fonctionnement et les principes du droit de l’Union. « La confiance mutuelle entre Etats membres » y était consacrée en tant que principe constitutionnel de l’UE, alors même que ce principe n’est pas inscrit en droit primaire.

Ce mardi 26 janvier 2016, la Cour Constitutionnelle Fédérale Allemande a publié le communiqué de presse (Press Release No. 4/2016) d’une décision qui bouleverse l’ordre établi.
En se fondant pourtant sur le principe de confiance mutuelle, elle affirme que la protection des droits fondamentaux peut exiger le contrôle de l’exécution d’un mandat d’arrêt européen (MAE) par rapport au respect de « l’identité constitutionnelle » allemande. Dès lors, elle ouvre la porte à l’hypothèse d’une non-application du droit de l’Union Européenne (UE), malgré le principe de primauté, après la mise en œuvre d’un contrôle constitutionnel.

Le principe de la confiance mutuelle a notamment servi à valider l’exécution de MAE alors que le respect de droits fondamentaux était mis en cause. Selon la CJUE, remettre en cause l’uniformité du standard de protection des droits fondamentaux défini par la décision-cadre du MAE de 2002 porterait atteinte, notamment, aux principes de confiance et de reconnaissance mutuelles que celle-ci tend à conforter (point 68 arrêt Melloni par exemple).

En l’espèce, un ressortissant américain faisait l’objet d’un MAE émis par l’Italie après avoir été condamné par défaut à trente ans d’emprisonnement. Arrêté en Allemagne, il refuse sa remise pour atteinte à ses droits fondamentaux en avançant deux moyens : il ignorait l’existence d’une telle condamnation et il sera pour lui impossible d’être entendu au cours d’une audition lors de la procédure d’appel en Italie.

La Cour Constitutionnelle Fédérale Allemande condamne la remise autorisée par les juges du fond. Même si le MAE remplissait formellement toutes les conditions prévues par la décision-cadre, elle considère qu’une telle décision viole les droits fondamentaux du justiciable en vertu de l’article 1 § 1 de la Loi Fondamentale allemande (LF). Sa décision va probablement faire l’effet d’une bombe. D’abord parce qu’elle semble prendre le contre-pied de la jurisprudence de la CJUE portant sur le MAE. Ensuite et surtout, parce qu’elle envoie un message très fort à l’ensemble des juges de l’UE.

1. Une décision à contre courant de la jurisprudence de la CJUE

Bien consciente du retentissement de sa décision, le Bundesverfassungsgericht (BVerfG) crée un contrôle constitutionnel exceptionnel pouvant aboutir à un nouveau motif de refus d’exécution du MAE. Si, a priori, la solution semble complètement révolutionnaire car contraire à la jurisprudence récente de la Cour de Justice (A), un examen plus approfondi montre que cette révolution est juridiquement très encadrée (B).

a. la position récente de la Cour de justice

La décision de la Cour Constitutionnelle allemande intervient alors que le MAE, fondé sur l’idée d’une confiance mutuelle entre Etats membres, fait l’objet d’une jurisprudence de la CJUE qui inquiète professionnels et chercheurs de droit.

Le 29 janvier 2013, dans l’arrêt RADU (aff. C- 396/11), la CJUE affirme que la Charte des Droits fondamentaux de l’UE ne donne pas lieu, par le biais de la reconnaissance de droits fondamentaux de l’accusé et du condamné, à de nouveaux motifs de refus d’exécution du MAE. En l’espèce le requérant contestait l’absence d’entretien préalable dans l’Etat d’exécution. Selon la Cour, le mécanisme, qui prévoit un entretien dans l’Etat d’émission, suffit pour garantir de manière générale les droits de la défense et le respect de la Charte. A nouveau, le 26 février 2013, la CJUE statue dans l’affaire Melloni (aff. C-399/11) en faveur de l’exécution du MAE. Elle refuse ainsi d’interpréter l’article 53 de la Charte de manière à en déduire un nouveau motif de refus d’exécution. L’absence de recours, en présence du condamné par défaut, dans l’État membre d’émission, alors que ce droit est ouvert dans l’Etat d’exécution, n’a aucune conséquence sur l’obligation d’exécution. La protection des droits est suffisamment garantie par le mécanisme du MAE. Certes, le 30 mai 2013, avec l’arrêt J. Forrest (aff. C-168/13PPU), la Cour accepte le renforcement de la protection des droits fondamentaux par la mise en place d’un recours suspensif, mais seulement tant qu’il ne met pas à mal le bon fonctionnement du mécanisme, c’est-à-dire tant qu’il respecte les délais imposés par la décision-cadre.

A chaque fois, la juridiction européenne habille d’un argument juridique des décisions d’opportunité. En effet, la raison principale de ces décisions est d’empêcher la mise en échec du système et donc d’assurer la réalisation de l’Espace de Liberté, de Sécurité et de Justice (ELSJ). De fait, la portée juridique de cette jurisprudence est contestée. Elle signifie que la CJUE hiérarchise les principes au sein de l’ordre juridique communautaire. Elle va essayer de concilier la primauté du droit de l’UE (et donc l’efficacité du système) avec une protection maximale des droits fondamentaux comme l’illustre l’affaire Melloni. Mais si ce n’est pas possible, la Cour va faire primer le premier principe et se contenter d’un standard de protection des droits fondamentaux qu’elle juge, de manière générale, suffisante.

Dès lors, les défenseurs de droits, au premier rang desquels se trouvent les Cours Constitutionnelles, s’inquiètent de voir les droits fondamentaux sacrifiés sur l’autel de l’efficacité et de la primauté du droit de l’UE. Ils ne souhaitent pas se contenter d’une protection « suffisante » mais recherchent une protection « maximale »… Ceci explique peut être la récente décision de la BVerfG. Elle présente une logique bien différente à celle de la CJUE.

b. une révolution juridique encadrée avec soin

Dans cette affaire, intéressant comme dans Melloni une condamnation par défaut, la Cour Constitutionnelle allemande semble réagir à la précédente jurisprudence en retenant une logique bien différente. La protection des droits fondamentaux peut justifier un contrôle du respect de l’identité constitutionnelle allemande (« identity review ») y compris lors de l’exécution d’un MAE et ce, malgré le principe de primauté. Contrairement à la logique de la jurisprudence de la CJUE, la Cour de Karlsruhe annonce ainsi que certains droits fondamentaux doivent primer, chaque fois qu’ils sont en cause, sur le principe de primauté. Cependant, loin d’afficher une opposition frontale, les juges allemands s’entourent de précautions en prononçant cette solution. Ce « nouveau » contrôle de l’identité constitutionnelle du droit dérivé est ainsi juridiquement fondé et très encadré.

Tout d’abord, la Cour limite sa décision aux droits fondamentaux constituant l’identité constitutionnelle allemande. Puis elle veille à définir l’identité constitutionnelle afin qu’elle ne constitue qu’un noyau dur constitutionnel. La «Basic Law’s constitutionnal identity” regroupe, en vertu des articles 23 paragraphe 1 et 79 paragraphe 3 FL, tout ce qui ne peut faire l’objet de révision constitutionnelle ou être modifié en raison de l’intégration européenne. C’est le cas des droits fondamentaux de l’article 1 LF.

Ensuite, les juges constitutionnels justifient juridiquement l’existence de ce contrôle. Ils le fondent sur l’article 4 §2 du Traité sur l’Union Européenne (TUE), « l’Union respecte l’égalité des États membres devant les traités ainsi que leur identité nationale, inhérente à leurs structures fondamentales politiques et constitutionnelles […] ». De cet article découlerait en substance le concept de « contrôle d’identité ». Par ailleurs, l’existence dans d’autres Cours Constitutionnelles de réserves similaires protégeant l’identité constitutionnelle au cours de l’intégration européenne corroborerait cette idée.

Enfin ce contrôle est exceptionnel et strictement conditionné. Limité uniquement aux droits procéduraux minimums (B. b)), cet « identity review » est une compétence réservée à la seule Cour Constitutionnelle fédérale. Les conditions de recevabilité de cette « requête constitutionnelle » sont par ailleurs élevées. Par exemple, la charge de la preuve pèse sur le requérant : c’est à lui de démontrer à la Cour constitutionnelle, de manière détaillée, en quoi son droit à la dignité n’est pas garanti en l’espèce. Le contrôle du juge sera quant à lui proportionnel à la gravité et la pertinence des éléments avancés par le requérant. Le BVerfG rassure même en affichant sa bonne foi vis-à-vis du droit de l’UE. Ce pouvoir de contrôle doit être exercé avec retenue et conformément à la logique d’intégration européenne.  À cette fin, la Cour se réfèrerait toujours à la jurisprudence de la CJUE.

La mise en œuvre de ce contrôle est par principe contraire au principe de primauté du droit de l’UE et à la logique de la jurisprudence de la CJUE en matière de MAE. Pour autant, tout en s’armant de prudence, la Cour constitutionnelle ne prend pas trop de risques en l’espèce. La procédure pénale italienne initiale comportait tellement de déficiences et d’atteintes aux garanties procédurales les plus élémentaires que l’application classique du droit de l’UE se serait opposée à l’exécution du MAE. Finalement, la révolution juridique est très encadrée et elle est avant tout théorique. Si la Cour constitutionnelle fédérale allemande prend toutes ces précautions juridiques afin d’éviter une guerre ouverte avec la CJUE, c’est parce qu’elle sait que sa solution envoie un message relativement dur vis-à-vis du système actuel de l’UE.

2. L’envoi, essentiellement, d’un message fort

L es juges constitutionnels allemands appliquent pour la première fois un contrôle d’identité constitutionnelle dans une affaire exclusivement couverte par le droit de l’UE. Ce faisant, ils envoient indéniablement un message fort à l’ensemble des juridictions de l’UE.

a. un message à l’adresse de la Cour de justice

Tout d’abord, le juge rappelle à la CJUE que la protection des droits fondamentaux est un impératif absolu. Le message semble clair, surtout lorsque la décision est lue dans son contexte. Si, les juges de la CJUE continuent d’affirmer dans leurs déclarations: « we are not a a fundamental right court » et s’ils refusent, dans leur jurisprudence, d’accorder à ces droits toute l’importance qu’ils méritent aux yeux du juge constitutionnel; cela tout en refusant l’adhésion de l’UE à la Convention Européenne des Droits de l’Homme et le contrôle de la Cour EDH… Alors la Cour Constitutionnelle prendra la relève.

Elle assurera la fonction, selon elle délaissée au sein de l’UE, de « protecteur suprême » des droits fondamentaux. Aux dépens de certains principes de l’UE s’il le faut. Cependant, le message envoyé n’est pas que provocateur. Plusieurs signes d’une volonté de dialogue de la part du BVerfG sont bien visibles.

D’abord la Cour affirme qu’elle se référera à la jurisprudence de la CJUE pour la mise en œuvre de son contrôle. Puis, elle rappelle qu’elle est désormais prête à poser une question préjudicielle sur le fondement de l’article 267 TFUE. Ce n’est pas anodin lorsque l’on sait qu’elle n’a accepté de le faire que très récemment : sa première et unique question préjudicielle à la CJUE date du 7 février 2014.

Un pas supplémentaire est également effectué dans le sens du dialogue, visant cette fois, le principe de confiance mutuelle. La Cour Constitutionnelle reconnaît ce principe sous- jacent à toute la jurisprudence de la CJUE sur le MAE. Elle souhaite cependant participer à son élaboration. Selon elle, ce principe doit être limité sous peine d’être affaibli: « however, this trust is shaken if there are factuel indications that the requirements that are absolutely essential for the protection of fuman dignity will not be met ». Selon elle, poser des limites à ce principe le renforce. La confiance mutuelle sur laquelle repose le MAE n’est que présumée, elle ne saurait être aveugle. Implicitement, le BVerfG interpelle la CJUE qui va devoir lui répondre. Cette dernière va-t-elle accepter la conception avancée par la Cour constitutionnelle ou au contraire refuser tout dialogue à ce sujet?

Il faut remarquer que dans le cadre de cette démarche, le juge constitutionnel allemand tente toujours de faire pencher la balance en faveur du dialogue. Même lorsqu’il se réclame le droit de participer à l’élaboration de ce nouveau principe, il veille à utiliser les sentiers tracés par la CJUE. La Cour constitutionnelle rappelle en effet, que le droit de l’UE lui-même prévoit que le principe de confiance mutuelle ne peut s’appliquer sans limite. Ce faisant, elle se réfère plus ou moins implicitement à la jurisprudence NS de la CJUE : en matière d’asile et d’immigration, le principe de confiance mutuelle entre Etats membres ne pose qu’une présomption réfragable de respect des droits fondamentaux. Il est d’ailleurs intéressant de noter que cette jurisprudence est elle même le fruit d’un dialogue entre la CJUE et la Cour Européenne des Droits de l’Homme (CEDH). Après l’avis 2/13, le BVerfG semble vouloir endosser, pour la jurisprudence en matière de coopération policière et judiciaire, le rôle qu’à tenu jusque là la CEDH, en matière d’asile et d’immigration…

Certains avanceront sans doute que le BVerfG n’a pas de réelle volonté de dialogue. Le refus de renvoi préjudiciel par lequel il conclut expressément peut, en effet, en faire douter. Le résultat de l’application de la règle de droit européenne, en l’espèce la mise en œuvre du MAE, ne laissait aucun doute quant à l’interprétation à donner : comme le souligne le juge constitutionnel, les faits de l’espèce sont clairement incompatibles avec le droit de l’Union. La solution à donner était donc, sans aucun doute possible, le refus d’exécution. Cependant, la forme que prend cette application de la règle de droit européen qu’est le MAE, le raisonnement juridique tenu par le BVerfG, est une nouveauté qui soulève des questions d’interprétation…

Sur ce point, la Cour constitutionnelle aurait bel et bien pu et du poser une question préjudicielle en interprétation sur le fondement de l’article 267 TFUE, au vu des arguments qu’elle développe et qui sont de principe. Néanmoins, une explication est peut être possible. Poser une question préjudicielle était courir le risque d’une fin de non-recevoir, d’une réponse lapidaire de la CJUE renvoyant à la jurisprudence Melloni et au principe de primauté. On peut alors imaginer que, persuadée de l’importance du problème posé, la Cour Constitutionnelle allemande ait préféré prendre une décision définitive afin de montrer sa détermination et être prise au sérieux, quitte à commettre un coup d’éclat. Réclamant un véritable dialogue avec la CJUE, d’égal à égal, elle franchit ainsi la ligne rouge au mépris de la jurisprudence Kobler.

Au final, la décision de la Cour constitutionnelle allemande est autant un rappel à l’ordre concernant l’importance des droits fondamentaux qu’une invitation au dialogue autour de l’élaboration du droit de l’UE. Malgré toutes les précautions prises par le BVerfG, il est cependant impossible de nier que les juges constitutionnels allemands, dans la lignée des arrêts Solange et Traité de Lisbonne, affichent une volonté de réappropriation des normes au profit du contrôle de constitutionnalité et aux dépens, en théorie du moins, du droit de l’UE.

b. un signal pour les cours constitutionnelles nationales

La décision du BVerfG ouvre la voie à de futurs contrôles similaires au sein de chaque ordre juridique national. Le rappel par la Cour, de l’existence de provisions constitutionnelles, dans certains Etats membres, afin de protéger leur identité constitutionnelle dans le cadre de l’intégration européenne, n’est pas anodin. Ces dernières années, presque toutes les Cours constitutionnelles au sein de l’UE ont en effet suivi la même voie que le BVerfG. Les cas de la France et de l’Italie sont de parfaits exemples.

Depuis sa décision « loi relative au droit d’auteur » du 27 juillet 2006, le Conseil Constitutionnel français présente explicitement les règles ou les principes inhérents à l’identité constitutionnelle de la France comme une limite à son contrôle du respect de l’exigence constitutionnelle de transposition des directives communautaires. La Cour Constitutionnelle italienne a quant à elle, par deux décisions du 24 octobre 2007, développé l’idée d’un contrôle constitutionnel pour une application et une interprétation des normes européenne (en l’espèce il s’agissait de la Conv. EDH mais l’idée est bien là) cohérentes par rapport aux normes constitutionnelles.

Pourtant, à cette réappropriation des normes au profit du contrôle constitutionnel s’ajoute parallèlement, l’ouverture d’un dialogue des juges avec la CJUE. En effet, ces deux juridictions ont elles aussi récemment accepté de poser des questions préjudicielles à la CJUE sur le fondement de l’article 267 TFUE. Le Conseil Constitutionnel a ainsi posé la première question préjudicielle avec la décision 2013-314 QPC Jérémy Forrest du 4 avril 2013 tandis que la Cour constitutionnelle italienne, moins réfractaire que sa voisine, avait déjà effectué un renvoi préjudiciel devant la CJUE en avril 2008.

Ce paradoxe, le début d’un dialogue avec la CJUE combiné au renforcement du contrôle constitutionnel, a conduit à une sorte de statut quo. Jusqu’à présent, les juges constitutionnels émettaient l’hypothèse d’un contrôle constitutionnel exceptionnel, pouvant déboucher sur une méconnaissance du principe de primauté (ou de celui d’effet direct) des actes de l’UE, sans jamais le mettre en pratique. La jurisprudence du Conseil Constitutionnel français en est encore une fois un exemple frappant.  À l’heure actuelle, il n’a jamais mis en œuvre son contrôle exceptionnel fondé sur l’identité constitutionnelle et d’ailleurs ces règles ou ces principes n’ont pas encore été identifiés.

La décision du BVerfG risque de changer la donne. De l’idée à sa mise en œuvre il n’y a qu’un pas et la Cour constitutionnelle allemande a osé le franchir. Certes la décision finale est en l’espèce conforme au droit de l’UE mais elle met bien en œuvre un contrôle d’identité constitutionnelle du droit de l’UE, malgré le principe de primauté. Le premier pas, le plus dur, est fait. Dès lors, il est tout à fait envisageable que d’autres Cours constitutionnelles suivent son exemple. La réponse à venir de la CJUE à cette décision a ainsi une importance capitale, non seulement pour la Cour constitutionnelle allemande mais pour toutes les Cours constitutionnelles de l’UE.

Au total, la jurisprudence entourant la mise en œuvre du MAE, fondé sur le principe de confiance entre Etats membres, a beaucoup inquiété la doctrine et les professionnels. Ils ont craint une harmonisation vers l’abaissement de la protection des droits fondamentaux au sein de l’UE. L’habitude de la CJUE d’affirmer qu’elle n’est pas une Cour de droits fondamentaux n’était pas pour les rassurer… Et voilà que la CJUE réutilise ce principe de confiance mutuelle afin de justifier, en partie, l’autonomie du système et l’impossibilité pour l’UE d’adhérer à la CEDH.

Ce mardi 26 janvier 2016, la Cour Constitutionnelle a réagi en conséquence. Elle nous offre une belle leçon de sa conception du principe de confiance mutuelle lorsque les droits fondamentaux sont en jeu, tout en prévenant la CJUE qu’elle est prête à reprendre son rôle de Cour suprême protectrice des droits fondamentaux.

Une chose est sûre, si pour l’instant le principe de confiance mutuelle au sein de l’UE, se limite selon la CJUE à la confiance mutuelle entre Etats membres ; il semble évident qu’une confiance mutuelle entre juges est indispensable au sein de l’UE. Le dialogue ouvert par la Cour Constitutionnelle allemande autour de la protection des droits fondamentaux et le principe de confiance mutuelle ne pourra déboucher sur le bon fonctionnement du système de l’UE que si les deux juridictions se font confiance. Dans ce climat de sourde tension, la réaction de la CJUE est attendue avec d’autant plus d’impatience que les autres Cours Constitutionnelles des Etats membres peuvent à tout moment décider de prendre le pas sur le BVerfG.

Le message sous-jacent est clair : au nom de la protection des droits fondamentaux, les Cours constitutionnelles veulent participer à la détermination (si ce n’est la délimitation) du principe de confiance mutuelle ; que la CJUE se le tienne pour dit.