La modification discrète du Code Frontières Schengen par le règlement 2016/1624 relatif au corps européen de garde-frontières : comblement d’une lacune ?

Le Conseil des ministres a adopté le 11 novembre 2016 une nouvelle décision permettant à cinq Etats Schengen de prolonger pour trois mois supplémentaires des contrôles aux frontières intérieures en cas de circonstances exceptionnelles. Cette décision faisant suite à celle du 12 mai 2016 qui avait autorisé ces contrôles pour six mois pose question au regard d’une modification de sa base juridique, à savoir, l’article 29 du Code Frontières Schengen (CFS, règlement 2016/399). En effet, le paragraphe 1er de cet article a été modifié récemment par l’article 80 du règlement 2016/1624 du 14 septembre 2016 relatif au corps européen de garde-frontières et de garde-côtes. Lire la suite

La Marche turque : quand l’Union sous-traite le respect de ses valeurs à un Etat tiers

par Henri Labayle, CDRE, et Ph. De Bruycker, Omnia

Le Conseil européen réuni le 7 mars était supposé examiner l’état d’avancement du Plan d’action entre l’Union européenne et la Turquie, conclu en novembre 2015. L’idée était que, faute de résultats probants, d’autres mesures soient arrêtées. L’arrivée d’une moyenne de 2000 personnes par jour en Grèce depuis le début du mois de janvier plaidait en ce sens.

Pour certains Etats membres, le «Plan B » consistait à fermer les frontières extérieures de l’espace Schengen, quitte à plonger la Grèce dans une crise absolue. Le président du Conseil européen y était favorable puisqu’un projet de conclusions du Conseil ayant fuité à la fin du week-end et largement repris dans la presse faisait état d’une « fermeture de la route des Balkans ». Lire la suite

La “jungle” de Calais devant le juge administratif et les défenseurs des droits fondamentaux

par Francisco Sanchez Rodriguez, CDRE

Présider la République, c’est être ferme, ferme y compris à l’égard de l’immigration clandestine et de ceux qui l’exploitent. Mais c’est traiter dignement les étrangers en situation régulière et ceux qui ont vocation à l’être sur la base de critères objectifs ». N’y aurait-il pas dans les propos ambitieux tenus par le candidat Hollande lors de son discours du Bourget, le 22 janvier 2012, une forme de connexité avec la sagesse de Socrate, celle de celui qui sait qu’il ne sait pas ?

L’humanisme, l’universalisme et l’atticisme des discours tenus par l’actuel chef de l’exécutif sur la politique migratoire interrogent. Mise en cause par Médecins Sans Frontières et la Commission nationale consultative des droits de l’homme, la puissance publique s’égare. Précarisation et exclusion deviennent les maitres mots de l’impasse dans laquelle se trouvent de nombreux migrants dans ce nouvel Etat dans l’Etat : la « Jungle » de Calais. Lire la suite

L’accueil des réfugiés et l’Union européenne : de la coupe aux lèvres, il y a loin

par Henri Labayle, CDRE

A la veille du sommet de la Valette où l’Union européenne et l’Afrique confrontent leurs points de vue sur la crise migratoire et au lendemain d’un Conseil des ministres de l’Intérieur informel tenu le 9 novembre, force est de convenir que l’état de la situation demeure dramatique.

Les victoires symboliques obtenues à la fin de l’été par le président de la Commission et ses alliés de la présidence luxembourgeoise, entraînés par le volontarisme du chancelier de la République fédérale, n’ont guère porté de fruits jusqu’ici. La mauvaise volonté ou l’incapacité des Etats membres à donner application à leurs engagements (1) révèle la persistance d’un désaccord politique de fond (2). Lire la suite

Quand le Conseil d’État feint l’ignorance… L’ordonnance en référé du 29 juin 2015 relative aux contrôles réalisés dans la zone frontalière franco-italienne

par Géraldine Bachoué, CDRE

Depuis quelques semaines, les forces de l’ordre effectuent de nombreux contrôles d’identité et de titres de séjour dans le département des Alpes-Maritimes. Ces contrôles n’ont pas lieu qu’à la frontière, mais également dans certaines villes à l’intérieur du territoire français ou dans les trains en provenance d’Italie. Des associations de défense et quatre migrants ont saisi le Conseil d’État d’un référé-liberté, soutenant que cette recrudescence des contrôles revenait à rétablir un contrôle systématique à la frontière, ce qui serait contraire aux règles européennes.

Plus précisément, la requête avait pour objet de faire cesser les atteintes aux libertés fondamentales résultant de la décision non publiée du ministre de l’intérieur, révélée par l’existence, depuis le 11 juin 2015, d’une part de contrôles frontaliers permanents à des points fixes de la frontière franco-italienne ciblant de manière discriminatoire les seuls migrants et d’autre part de contrôles d’identité systématiques dans les trains en provenance de cette zone ciblant au faciès les mêmes populations. Lire la suite

Agenda européen pour les migrations et protection des réfugiés : « l’Europe n’est pas à la hauteur »

par Henri Labayle, CDRE

Ces fortes paroles du président de la Commission, à l’issue du Conseil européen des 25 et 26 juin, sont un reflet exact de la situation. La déception qu’elles traduisent est à la mesure du geste politique accompli par le chef de l’exécutif. Il convient de lui en rendre justice.

La tiédeur des conclusions adoptées par les chefs d’Etat et de gouvernement est en effet symptomatique d’une Europe se berçant de mots, incapable de respecter les valeurs dont elle se réclame. En bref, en pleine crise d’identité comme de projet. Incapables de s’accorder sur un accueil obligatoire des demandeurs de protection (1), les Etats membres se sont satisfaits du simple principe de cet accueil (2).

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European Agenda on migration and protection of refugees; “Europe is not equal to the task”

By Henri Labayle, CDRE

These strong words stated by the President of the Commission at the close of the European Council Summit mirror the situation perfectly. The disappointment they translate is matched by the political gesture carried out by the chief of the Executive. It is only fitting that he is done justice.

The tepidity of the conclusions adopted by the heads of state and government is in fact symptomatic of a Europe which is deluding itself with words and is incapable of respecting the very values it lays claim to. In short, Europe is in the midst of both an identity crisis and a direction crisis. As they are incapable of coming to an agreement on compulsory reception of applicants for persons seeking protection (1), the member states have merely complacently assented to the basic principle of this reception (2). Lire la suite

The European Agenda on Migration: four announcements and a funeral ?

by Henri Labayle, CDRE

Rarely has a Commission Communication been so eagerly anticipated. The “European Agenda on Migration” (COM (2015) 240)was presented with great pomp on 13th May 2015 by the two vice-presidents of the Commission in connection with the dossier and the Commissioner.

Rarely has a declaration of intent of this nature produced such a virulent media and political outcry either. The searing vociferation is compounded by the fact that its authors express themselves at length on subjects they know nothing about, most notably the French political class. It has also given numerous opportunities for minor powdered Marquis to hold forth on the ‘human rightsism’ of the Commission, with no regard of the values, the rights and the traditions of the Republic which they claim to possess. Lire la suite

L’Agenda européen sur la migration : quatre affichages et un enterrement ? (actualisation)

par Henri Labayle, CDRE

Rarement une Communication de la Commission aura été attendue comme l’était celle relative à « l’Agenda européen sur la migration » (COM (2015) 240) présentée le 13 mai 2015, en grande pompe, par les deux vice-présidents de la Commission en lien avec le dossier et le commissaire en charge.

Rarement, aussi, une déclaration d’intentions de cette nature aura déclenché une telle levée de boucliers, médiatique comme politique. La virulence des critiques est d’autant plus vive que leurs auteurs s’expriment abondamment sur des sujets dont ils ignorent tout, notamment dans la classe politique française. Elle donne ainsi l’occasion à nombre de petits marquis poudrés de pourfendre doctement le « droit de l’hommisme » de la Commission, au mépris des valeurs, du droit et des traditions de la République dont ils se prétendent propriétaires. Lire la suite