Le principe de proportionnalité en coopération judiciaire pénale : principe janusien de l’espace pénal européen

par Guillemine Taupiac-Nouvel, IRDEIC

Le principe de proportionnalité raisonne autant dans les esprits des pénalistes, habitués à travailler les règles internes de droit pénal général et de procédure pénale, que des européistes, travaillant eux en droit de l’Union européenne et plus particulièrement en droit communautaire. Or, le respect du principe de proportionnalité est devenu depuis quelques années une préoccupation majeure en droit de la coopération judiciaire pénale européenne, une matière qui se développe dans l’ELSJ.

Le principe de proportionnalité en coopération pénale semble avoir au moins deux des caractéristiques qui participent à l’identité des principes de l’ELSJ : Une spécificité au regard des principes généraux du droit de l’Union européenne, ce qui implique la détermination des matrices du principe en coopération judiciaire pénale. Une spécificité au regard des principes fondamentaux de la matière considérée, ici le droit pénal, ce qui suppose de distinguer les critères d’application de la proportionnalité dans le contexte, particulier, de la reconnaissance mutuelle des décisions répressives dans l’Union européenne.

Mais l’étude du principe de proportionnalité en droit européen de la coopération pénale s’accompagne d’une bonne et d’une mauvaise nouvelle.

La bonne nouvelle : en droit pénal, le principe de proportionnalité est fondamental, il est un des principes de l’Etat de droit souvent au respect de la personne humaine. Il suppose de modérer la réaction sociale face à un comportement infractionnel en mettant en balance les intérêts de la personne poursuivie, de la société. Il s’impose au législateur mais également aux acteurs de la procédure pénale. Aussi, s’interroger sur la proportionnalité du droit pénal européen, c’est entrer au cœur de la matière, c’est se poser la bonne question.

Ce sont les juges nationaux, premiers acteurs des instruments de coopération pénale tel le mandat d’arrêt européen (MAE), qui révèlent dès 2009 la nécessité de se préoccuper de la proportionnalité. C’est également le déficit de proportionnalité dans les instruments de coopération qui pousse en 2013 le Royaume-Uni à envisager de se retirer du MAE. La Commission européenne, elle-même, considère que le principe de proportionnalité a, en quelque sorte, une fonction active dans l’ELSJ. Il permettrait d’asseoir la confiance mutuelle en coopération pénale.

La mauvaise nouvelle : Ce qui conduit à rechercher les sources du principe en droit de l’Union européenne. Elles sont variées dès lors qu’on trouve le principe de proportionnalité dans l’article 5 du TUE mais également aux articles 49-3 et 52 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne. Il est vrai que l’on s’interroge alors sur la base juridique la plus appropriée pour la coopération judiciaire pénale. D’autant qu’en droit dérivé, les instruments de coopération judiciaire pénale (le MAE, la Décision d’enquête européenne (DEE) adoptée en avril 2014) ne semblent pas offrir aux autorités nationales les outils nécessaires au respect effectif du principe de proportionnalité dans ce domaine.

Et c’est là que l’on arrive à la mauvaise nouvelle : il est en effet difficile de savoir de quoi on parle en coopération pénale et la littérature n’est pas très fournie. L’exemple de l’affaire Julian Assange est assez révélateur : les juges anglais (Queen’s Bench Division, Novembre 2011) refusent d’exécuter un MAE au motif que l’émission de cette décision judiciaire par la Suède est « disproportionnée ». Le MAE avait pour objet de permettre l’audition de Julian Assange en Suède sans qu’il existe au préalable dans cet Etat membre de décision de poursuites. Mais parle-t-on vraiment de proportionnalité ? S’agit-il de regarder si une autre mesure aurait été plus opportune, comme un interrogatoire en visio ? Ou s’agit-il, plus radicalement, de refuser l’exécution pour sanctionner la proportionnalité entre les faits reprochés (ici des agressions sexuelles) et l’atteinte à la liberté individuelle que représente en soit l’exécution d’un MAE (supposant une arrestation, une détention en principe et une remise) ?

Il apparaît qu’en coopération pénale la proportionnalité soit recherchée dans le rapport entre la mesure répressive, que représente l’instrument de coopération, et la protection des libertés individuelles dans la procédure de coopération. Il s’agit donc véritablement d’une nouvelle question, totalement spécifique à l’ELSJ : appliquer le principe de proportionnalité de la répression dans les instruments de reconnaissance mutuelle des décisions répressives.

En coopération judiciaire, la proportionnalité d’une mesure peut être vérifiée à deux moments distincts de la procédure : au stade de l’émission de la décision de coopération et au stade de l’exécution de la mesure. D’un côté, les autorités d’émission devraient justifier la nécessité et l’opportunité de la mesure de coopération et, de l’autre côté, celles d’exécution devraient pouvoir refuser d’exécuter la mesure de coopération pour manifeste disproportion aux faits commis. Dans le premier cas, on a un peu l’impression d’un rappel d’une obligation conventionnelle et constitutionnelle existante dans les ordres juridiques nationaux. Mais peut-être est-il nécessaire de l’adapter à chaque instrument de coopération ou au moins de fixer des critères spécifiques au regard des objectifs de l’ELSJ ? Dans le second cas, on se réfèrera à la jurisprudence constante de la CJUE en matière de MAE en vertu de laquelle il n’est possible de faire obstacle à la reconnaissance mutuelle d’une décision pénale étrangère que si cela est prévu dans la décision-cadre ou la directive au titre d’un motif de non-exécution.

Il semble que la tension se cristallise vraiment au stade de l’exécution des mesures de coopération. Les refus d’exécution de MAE sur le fondement d’une disproportion entre l’acte de coopération et les faits commis se sont multipliés dans les Etats membres, notamment au RU, en Allemagne, en République d’Irlande. Or, la CJUE, et malgré des sollicitations dans des affaires récentes, reste plutôt silencieuse sur les critères d’application de la proportionnalité laissant le champ libre aux aléas des approches nationales.

Pour quelques éclairages peut-être faut-il envisager le principe de proportionnalité en coopération judiciaire pénale au travers d’abord de ses matrices (I) et ensuite de ses critères d’application (II).

1. Les matrices du principe de proportionnalité en coopération judiciaire pénale

Elles se trouvent dans le droit primaire (A) mais également dans le droit dérivé de la coopération judiciaire pénale (B).

a. Le principe de proportionnalité dans le droit primaire

Principe général – Action de l’Union européenne. Quand la création du Parquet européen a été remise en cause par les Parlements nationaux en 2013 en vertu du contrôle du principe de subsidiarité, a été aussi vérifiée la proportionnalité de l’action de l’Union européenne ici en matière répressive. L’article 5 TUE prévoit que « … Les principes de subsidiarité et de proportionnalité régissent l’exercice de ces compétences … En vertu du principe de proportionnalité, le contenu et la forme de l’action de l’Union n’excèdent pas ce qui est nécessaire pour atteindre les objectifs des traités. Les institutions de l’Union appliquent le principe de proportionnalité conformément au protocole sur l’application des principes de subsidiarité et de proportionnalité ».

L’action du législateur européen dans le domaine pénal est ainsi régie par ce principe général du droit communautaire en vertu duquel, et pour reprendre l’expression constante de la Cour de justice, « les moyens mis en œuvre par le droit communautaire doivent être aptes à réaliser l’objectif visé et ne doivent pas aller au-delà de ce qui est nécessaire pour l’atteindre ». Ce principe général est systématiquement rappelé dans les préambules des instruments mettant en œuvre la reconnaissance mutuelle en matière pénale depuis 2002.

Principe fondamental en droit de l’UE – Spécificité en matière pénale. Le tournant dans la vie du principe de proportionnalité dans l’Union européenne se marque, sans doute, avec la Charte des droits fondamentaux de l’UE. La Charte va consacrer la valeur constitutionnelle du principe de proportionnalité dans l’Union européenne en précisant son champ d’application. En vertu de l’article 52, toute limitation par le droit de l’Union des droits fondamentaux et des libertés individuelles doit être nécessaire et répondre effectivement à des objectifs d’intérêt général reconnus par l’Union ou au besoin de protection des droits et libertés d’autrui. Concrètement, appliqué à la matière pénale, cela signifie qu’une mesure répressive de droit européen ne peut venir limiter les droits des individus qu’à la condition d’être nécessaire et de répondre à un objectif d’intérêt général reconnu par l’Union. C’est ici qu’on rappellera que la CJUE dans les affaires Radù et Melloni, considère que « l’objectif assigné à l’Union est de devenir un espace de liberté de sécurité et de justice en se fondant sur le degré de confiance élevé qui doit exister entre les États membres ». Ainsi, l’article 52 offrirait au principe de proportionnalité une fonction générale de légitimation du droit pénal de l’UE.

L’article 49 §3 de la Charte est plus spécifique à la matière répressive en ce qu’il prévoit que « l’intensité des peines ne doit pas être disproportionnée par rapport à l’infraction ». Cependant, de prime abord, on se demande comment une autorité nationale d’exécution pourrait refuser d’exécuter un MAE ou une décision d’enquête européenne (DEE) sur le fondement de cet article ? Opérer un tel contrôle de la peine prononcée ou encourue dans l’Etat d’émission ne revient-il pas à remettre en cause le principe même de reconnaissance mutuelle des décisions étrangères ?

Les dispositions de droit dérivé sont ici déterminantes pour comprendre la place du principe de proportionnalité dans la logique de la reconnaissance mutuelle des décisions répressives.

b. Le principe de proportionnalité dans le droit dérivé

Les dispositions de droit dérivé. Les acteurs des procédures de coopération judiciaire pénale sont les premiers concernés par le respect du principe de proportionnalité. Ils y sont d’autant plus sensibles qu’ils sont imprégnés par l’exigence de proportionnalité en droit pénal interne. On l’a dit les dispositions sanctionnant le respect du principe de proportionnalité peuvent figurer dans les conditions d’émission ou d’exécution de l’acte de coopération.

Absence problématique de dispositions dans la décision-cadre MAE. Aucune de ces deux dispositions ne figure dans la décision-cadre sur le MAE. Cette absence peut recevoir deux interprétations. Selon une première interprétation, les dispositions de la décision-cadre peuvent être considérées comme suffisamment protectrices du principe de proportionnalité au regard du droit primaire. D’une part, elles permettent d’assurer un juste équilibre entre répression et liberté individuelle. A cet égard, on relève le quantum minimum de peine, obligatoire pour pouvoir émettre un MAE (pas moins de quatre mois en cas de condamnation, pas moins de douze mois en cas de poursuites). Encore, on peut citer ici le motif de refus basé sur le principe Ne bis in idem qui permet de refuser d’exécuter un MAE si la personne a déjà été condamnée pour des faits identiques et donc d’empêcher in fine le cumul de sanctions pénales. D’autre part, chaque Etat membre étant responsable dans son ordre juridique de la garantie des droits fondamentaux et d’une justice pénale respectant les libertés individuelles, le respect du principe de proportionnalité resterait l’affaire de chaque ordre juridique national.

La seconde explication consiste à considérer que tout contrôle de proportionnalité dans la mise en œuvre des instruments de coopération pénale remet en cause le principe de reconnaissance mutuelle. Il serait interdit afin d’éviter de revenir sur le bien-fondé d’une mesure répressive décidée par l’autorité judiciaire d’un autre Etat membre. Cette interprétation ne convainc pas davantage que la première, l’absence du principe de proportionnalité faisant l’objet de vives critiques.

Présence dans la Directive DEE – Innovation. Face à l’expérience du MAE, le législateur européen a alors introduit dans le nouvel instrument de coopération judiciaire pénale le principe de proportionnalité. La directive du 3 mai 2014 créant la DEE prévoit au Considérant 11 de son Préambule qu’« une décision d’enquête européenne devrait être choisie lorsque l’exécution d’une mesure d’enquête semble proportionnée, adéquate et applicable au cas en question. L’autorité d’émission devrait par conséquent vérifier si la preuve recherchée est nécessaire et proportionnée aux fins de la procédure, si la mesure d’enquête choisie est nécessaire et proportionnée aux fins de l’obtention de la preuve concernée, et si une décision d’enquête européenne devrait être émise aux fins d’associer un autre État membre à l’obtention de cette preuve… L’exécution d’une décision d’enquête européenne ne devrait pas être refusée pour des motifs autres que ceux mentionnés dans la présente directive. Néanmoins, l’autorité d’exécution devrait pouvoir choisir une mesure d’enquête moins intrusive que celle indiquée dans la décision d’enquête européenne concernée si elle permet d’atteindre des résultats similaires ». Cette disposition diffuse est censée guider, d’une part, le travail de transposition par les Etats membres et, d’autre part, la mise en œuvre de l’acte de coopération judiciaire par les juges nationaux. A noter que la directive intègre également l’exigence de proportionnalité au titre des conditions d’émission par l’autorité judiciaire de la décision d’enquête (article 6).

Cette présence innovante du principe de proportionnalité dans le droit dérivé de la coopération pénale, et les critiques de son absence dans la décision-cadre MAE, invitent à s’interroger sur les critères d’application du principe de proportionnalité dans ce domaine.

2. Les critères d’application du principe de proportionnalité en coopération judiciaire pénale

Pour envisager les critères d’application du principe de proportionnalité dans les instruments de reconnaissance mutuelle des décisions répressives, il faut distinguer selon le moment de la procédure de coopération pénale. Il y aurait des critères d’application du principe de proportionnalité au stade de l’émission (B) et au stade de l’exécution (A) de la mesure de coopération pénale. Le moment de l’exécution étant sans doute le plus sensible, on commencera par là.

a. Les critères d’application au stade de l’exécution de l’acte de coopération

Enjeux au stade de l’exécution. Préserver la reconnaissance mutuelle. A ce stade, l’autorité d’exécution doit apprécier le rapport entre la mesure répressive que représente un MAE, par exemple, et la protection des droits fondamentaux et libertés de l’individu. Pour cela, elle est obligée de revenir sur le bien-fondé de la décision prise par l’autorité d’émission. Ce qui revient à mettre à mal la confiance mutuelle sur laquelle repose la reconnaissance mutuelle des décisions étrangères.

Les critères posés par les juridictions nationales. Malgré cela, certaines juridictions nationales comme, par exemple, la Cour Régionale de Stuttgart en 2010 ou la High Court of Ireland en 2012 ont posé, dans le silence de la décision-cadre MAE, un « test de proportionnalité » au stade de l’exécution d’un MAE. Le test est juridiquement basé sur l’article 49-3 de la Charte et consiste à vérifier à la lumière du droit de l’Etat d’exécution que la peine prononcée ou encourue ne soit pas « manifestement disproportionnée » (ou d’une « sévérité intolérable ») par rapport aux faits commis et aux circonstances. Ainsi, le juge allemand décide d’exécuter un MAE émis par l’Espagne contre un individu qui encourt quatre années de prison en Espagne pour la vente de 0.2 gr de cocaïne. Alors que les juges irlandais, dans un arrêt très motivé du 8 février 2012 (MJLR v Ostrowski- High Court of Ireland), refusent d’exécuter le MAE émis par les autorités polonaises pour la poursuite d’un individu accusé de possession de 0.72 gr de marijuana et encourant trois ans de prison. De tels aléas dans la mise en œuvre du principe de reconnaissance mutuelle dans l’espace pénal européen ne sont pas opportuns.

Les réponses de la CJUE. L’Avocat Général Yves Bot rappelle, dans l’affaire Melloni en février 2013, que les droits et principes fondamentaux doivent être interprétés à la lumière de la structure et des objectifs de l’Union parmi lesquels figure la création de l’ELSJ. En ce sens, le principe de proportionnalité devrait donc être appliqué au regard des impératifs liés à l’action de l’Union et de la spécificité du droit de l’Union, écartant ainsi les conceptions nationales au moment de la mise en œuvre du droit de la coopération pénale.

On ne peut alors que regretter que la CJUE n’ait pas saisi l’occasion qui lui était donnée dans l’affaire Radù, en janvier 2013, pour se positionner expressément sur le principe de proportionnalité. Une des questions posées par le juge roumain était de savoir si « l’ingérence de l’Etat d’exécution d’un MAE dans l’exercice du droit à la liberté individuelle de la personne visée doit remplir les conditions de nécessité dans une société démocratique et de proportionnalité avec le but poursuivi » ? L’Avocat général Eleanor Sharpston souligne dans ses conclusions que la Cour de justice ne s’est pas encore prononcée sur l’interprétation de l’article 49§3 de la Charte, et on ne sait pas s’il serait possible de refuser d’exécuter un MAE pour une peine manifestement disproportionnée. En l’état actuel de la jurisprudence de la CJUE, mettant systématiquement en avant le principe de reconnaissance mutuelle pour l’efficacité de la répression dans l’Union européenne, la réponse reste négative.

Mais le débat n’est pas terminé avec la transposition imminente de la DEE, à moins qu’une application uniforme de critères de la proportionnalité au stade de l’émission de l’acte de coopération ne s’avère suffisante.

b. Les critères d’application au stade de l’émission de l’acte de coopération

Enjeux au stade de l’émission. Confiance mutuelle. Un contrôle de proportionnalité au stade de l’émission d’un acte de coopération pénale signifie assurer la qualité de la répression à l’échelle européenne, la légitimité de la coopération judiciaire pénale. En outre, imposer aux autorités de procéder à ce contrôle revient à alimenter la confiance mutuelle des autorités judiciaires. C’est la même logique que l’on retrouve dans l’harmonisation des garanties procédurales afin de faciliter la reconnaissance mutuelle des décisions pénales.

Les critères posés par la Commission. La CJUE n’a pour l’instant pas été saisie d’une telle question. En revanche, la Commission européenne fournit des éléments dans son rapport de 2011 sur la mise en œuvre du MAE. Selon la Commission, « un contrôle de la proportionnalité est nécessaire pour éviter que des mandats d’arrêt européens ne soient émis pour des infractions qui, bien qu’elles relèvent du champ d’application de la DC, ne sont pas suffisamment graves pour justifier les mesures et la coopération que l’exécution d’un tel mandat impose. Plusieurs aspects doivent être pris en compte avant l’émission d’un mandat d’arrêt européen, notamment la gravité de l’infraction, la durée de la condamnation, l’existence éventuelle d’une autre procédure qui soit moins lourde, tant pour la personne recherchée que pour l’autorité d’exécution, et une analyse du rapport coûts-avantages de l’exécution du mandat d’arrêt européen. Les conséquences sur la liberté des personnes recherchées sont disproportionnées lorsque des mandats d’arrêt européens sont émis dans des affaires pour lesquelles la détention (provisoire) serait normalement considérée comme inappropriée ». Le renvoi ici effectué aux droits pénaux nationaux est tout à fait surprenant.

Recours. A cela s’ajoute une autre difficulté. En effet, que l’on envisage une modification du texte sur le MAE ou la mise en œuvre de la directive DEE, la question qui se profile est celle du recours contre la décision de l’autorité d’émission sur le fondement de la proportionnalité ? Dans quel Etat membre ce recours doit-il être prévu ? Partant que l’autorité d’exécution devrait être tenue à l’écart du contrôle de proportionnalité, la sanction effective du respect du principe de proportionnalité ne peut être assurée que dans l’Etat d’émission. Or, avant la décision sur l’exécution de l’acte de coopération qui doit être rapide (conformément au principe de reconnaissance mutuelle) ce recours ne peut techniquement être organisé, et, après la décision d’exécution, le recours ne perd-il pas toute utilité ?

Conclusion. Finalement, il n’est pas aisé de distinguer le principe de proportionnalité en coopération judiciaire pénale de l’Union européenne même si le détachement progressif des conceptions traditionnelles de droit communautaire et de droit pénal interne est indéniable. Le principe de proportionnalité, tourné vers l’avenir de l’ELSJ, serait le principe janusien de la dimension répressive de l’Union européenne, la clé de l’espace pénal