L’arrêt de la CJUE du 4 octobre 2018, Commission c. France, vertus et limites du dialogue des juges au Palais Royal

Dans un arrêt retentissant, la Cour de Justice de l’Union européenne a, pour la première fois, constaté le manquement d’un Etat membre imputable à l’une de ses juridictions suprêmes pour ne pas l’avoir saisie à titre préjudiciel, sur la base de l’article 267 TFUE. L’arrêt Commission c. France rendu le 4 octobre 2018 (C-416/17) demeurera donc dans les annales, étant entendu qu’il s’agit là d’un manquement constitué par le refus du Conseil d’Etat de déférer à son obligation de renvoi. Il interroge quant son caractère anecdotique ou quant à la mise à jour d’un nouveau climat dans les relations juridictionnelles au sein de l’Union.

Au delà de ses aspects fiscaux, dont les conséquences pour les finances publiques sont loin d’être négligeables (environ 5 milliards d’euros), l’affaire Commission c. France retient évidemment l’attention des observateurs de « l’Europe des juges ».

Le Conseil d’État avait interrogé en 2010, la CJUE quant à l’interprétation des articles 43 et 56 TFUE dans le cadre d’un litige opposant le ministre du Budget à la société Accor, celle-ci demandant la restitution du « précompte mobilier » qu’elle a dû acquitter lors de la redistribution de dividendes à ses actionnaires au titre des années 1999 à 2001. La réponse de la Cour, le 15 septembre 2011, dans son arrêt Accor SA (C-310/09) paraissait suffisamment compréhensible pour ne pas nourrir de doute outre mesure. Cependant, dans deux affaires tranchées le 10 décembre 2012, les affaires Rhodia (n° 317074) et Accor (n° 317075), le Conseil d’Etat ne l’avait pas jugée suffisamment convaincante pour s’y conformer ou même tenter de l’approfondir en ayant à nouveau recours à un renvoi.

Phénomène inédit dans les relations que l’Union entretient avec les juridictions suprêmes des Etats membres, la saisine de la Commission, gardienne des traités, par plusieurs requérants s’estimant lésés, au titre de l’article 258 TFUE, va conduire à l’ouverture d’une procédure de recours en constatation de manquement. Chacun campant sur ses positions, le litige va se concrétiser, le 4 octobre 2018, devant la cinquième chambre de la Cour de justice.

Jamais, la République française n’avait eu à répondre de l’action contentieuse de l’une de ses juridictions suprêmes dans un tel cadre procédural, celui d’un recours en constatation de manquement pour violation de l’obligation de renvoi préjudiciel pesant sur une juridiction dont les décisions ne sont pas susceptibles de recours.

      1. De la nécessité d’un renvoi préjudiciel

La Commission estimait en l’espèce que le Conseil d’État aurait dû procéder le 10 décembre 2012 à un renvoi préjudiciel en direction de la Cour de justice avant de trancher le litige qui lui était soumis, en raison de sa qualité de juridiction statuant en dernière instance au sens de l’article 267 §3 TFUE. La Commission considérait que le Conseil d’Etat y était tenu, au vu des difficultés à tirer les conséquences de l’arrêt Accor SA. La Cour y avait constaté une différence de traitement née du refus de prendre en compte l’imposition subie par les sous-filiales établies dans un État membre autre que la France alors que le mécanisme applicable aux sous-filiales établies en France permettait à celles-ci de verser à la société intermédiaire bénéficiaire des dividendes exemptés du coût de l’impôt qui les frappaient.

Si la Cour n’avait pas vidé alors l’abcès de la prise en compte de l’impôt acquitté par les sous-filiales de la société mère, celui-ci avait fait en revanche l’objet d’une jurisprudence postérieure jugée « particulièrement claire » (pt 40) par les conclusions de l’avocat général Wathelet (CJUE, 13 novembre 2012, Test Claimants in the FII Group Litigation (C‑35/11).

Faisant le choix solitaire de n’en pas tenir compte, au motif que le régime britannique était différent du régime français de l’avoir fiscal et du précompte, le Conseil d’État courrait le risque d’un désaveu et d’une divergence de jurisprudence. Il ne s’attendait manifestement pas à voir le premier se concrétiser, malgré les doutes exprimés par son rapporteur public et la demande expresse des requérants de recourir à l’aide de la Cour de justice.

La défense du gouvernement français peinait d’ailleurs à s’articuler sur le rappel que la jurisprudence de la Cour n’exige pas des juridictions nationales un renvoi en direction de Luxembourg au seul motif qu’une partie à l’instance le souhaite et qu’il s’agissait, en tout état de cause, là de difficultés factuelles accentuées par l’absence de précisions en provenance de la Commission. Il paraissait donc hasardeux de plaider que le juge administratif était fondé à considérer que les réponses aux questions auxquelles il était confronté s’imposaient avec une évidence suffisante pour qu’il n’en résulte pas d’obligation de poser à la Cour une nouvelle question préjudicielle.

Du point de vue de l’avocat général Wathelet, il ne faisait aucun doute que le manquement était consommé du fait de l’absence de renvoi de la part du Conseil d’Etat. Dans ses conclusions du 25 juillet 2018, il avançait ainsi qu’il « est constant que la responsabilité d’un État membre au regard de l’article [258 TFUE] est engagée, quel que soit l’organe de l’État dont l’action ou l’inaction est à l’origine du manquement, même s’il s’agit d’une institution constitutionnellement indépendante » (pt 88). La jurisprudence de la Cour de justice est constituée sur ce point : CJCE, 5 mai 1970, Commission/Belgique (77/69, EU:C:1970:34, pt 15) ; CJCE, 9 décembre 2003, Commission/Italie (C 129/00, EU:C:2003:656, pt 29), et CJUE, 12 novembre 2009, Commission/Espagne (C 154/08, non publié, EU:C:2009:695, pt 125 ).

Position cohérente à la fois avec la lettre et le but de l’obligation de saisine de l’article 267 §3 TFUE (« Lorsqu’une telle question est soulevée dans une affaire pendante devant une juridiction nationale dont les décisions ne sont pas susceptibles d’un recours juridictionnel de droit interne, cette juridiction est tenue de saisir la Cour »), mais aussi avec les conditions du régime de responsabilité des États membres en cas de violation du droit de l’Union. L’obligation de saisine prévue à cet article a en effet notamment pour but de prévenir que ne s’établisse, dans un État membre, une jurisprudence nationale qui divergerait avec les règles du droit de l’Union. La Cour l’a rappelé dans l’arrêt Aquino du 15 mars 2017 (C-3/16), lui-même renvoyant aux arrêts du 15 septembre 2005, Intermodal Transports, lui-même faisant référence à l’arrêt du 22 février 2001, Gomes Valente.

Comme l’avocat général Yves Bot a eu l’occasion de le souligner dans l’affaire Ferreira da Silva e Brito (C-160/14), le non-respect par les juridictions nationales dont les décisions ne sont pas susceptibles d’un recours juridictionnel de droit interne de leur obligation de renvoi conduit autrement à priver la Cour de la mission fondamentale qui lui est assignée à l’article 19 §1 premier alinéa du TUE : assurer « le respect du droit dans l’interprétation et l’application des traités ». On sait à quel point, et ce blog s’en est fait l’écho récemment encore, la Cour attache d’importance à cet élément constitutionnel de l’ordre juridique de l’Union.

En des temps où la cohésion de cet ordre juridique est mise à mal ou, à tout le moins mise en doute, par certains juges nationaux, la Cour de justice ne pouvait manquer  de réagir. Consciente de l’impact de sa décision mais désireuse de respecter la susceptibilité du juge national, elle fait l’économie d’une leçon de choses trop appuyée à son adresse. Nul doute pourtant qu’elle s’inscrit ici dans la défense du « cadre constitutionnel » dont le point 175 de son avis 2/13 décrivait l’importance : « … la clef de voute du système juridictionnel ainsi conçu est constituée par la procédure du renvoi préjudiciel prévue à l’article 267 TFUE qui, en instaurant un dialogue de juge à juge précisément entre la Cour et les juridictions des États membres, a pour but d’assurer l’unité d’interprétation du droit de l’Union (voir, en ce sens, arrêt van Gend & Loos, EU:C:1963:1, p. 23), permettant ainsi d’assurer sa cohérence, son plein effet et son autonomie ainsi que, en dernière instance, le caractère propre du droit institué par les traités (voir, en ce sens, avis 1/09, EU:C:2011:123, points 67 et 83) ».

La sobriété et la concision des termes qu’elle utilise pour constater le manquement du Conseil d’Etat à son obligation se suffisent à elles-mêmes.

    2. De l’engagement de la responsabilité de l’Etat membre

Une jurisprudence constante établit que l’inexécution de l’obligation de renvoi préjudiciel imposée à l’article 267, troisième alinéa, TFUE est l’un des éléments devant être pris en compte dans l’examen de la responsabilité d’un État membre, dans l’hypothèse d’une décision d’une juridiction nationale statuant en dernier ressort.

L’arrêt de principe en la matière a quinze ans (CJUE, 30 septembre 2003, Gerhard Köbler contre Republik Österreich, C-224/01). Les juges de Luxembourg y énonçaient les conditions d’engagement de la responsabilité d’un Etat membre : « en vue d’établir une responsabilité éventuelle de l’État en raison d’une décision d’une juridiction nationale statuant en dernier ressort, il y a lieu de tenir compte de la spécificité de la fonction juridictionnelle ainsi que des exigences légitimes de sécurité juridique. La responsabilité de l’État du fait d’une violation du droit communautaire par une telle décision ne saurait être engagée que dans le cas exceptionnel où le juge a méconnu de manière manifeste le droit applicable.

Afin de déterminer si cette condition est réunie, le juge national saisi d’une demande en réparation doit tenir compte de tous les éléments qui caractérisent la situation qui lui est soumise. Parmi ces éléments figurent notamment le degré de clarté et de précision de la règle violée, le caractère délibéré de la violation, le caractère excusable ou inexcusable de l’erreur de droit, la position prise, le cas échéant, par une institution communautaire, ainsi que l’inexécution, par la juridiction en cause, de son obligation de renvoi préjudiciel en vertu de l’article 234, alinéa 3, CE » .

En l’espèce, l’appréciation du manquement éventuel commis par le Conseil d’Etat en  refusant de solliciter la Cour préjudiciel était d’autant plus marquée qu’un premier arrêt avait déjà été rendu par la Cour de justice, celui de 2011. En effet, selon la Cour, l’obligation qui pèse sur un État membre aux termes de l’article 260 §1 TFUE signifie que « tous les organes de l’État membre concerné ont l’obligation d’assurer, dans les domaines de leurs pouvoirs respectifs, l’exécution de l’arrêt de la Cour. [C’est ainsi que l]es juridictions de l’État membre concerné ont de leur côté l’obligation d’assurer le respect de l’arrêt dans l’exercice de leur mission » (14 décembre 1982, Waterkey, 314/81 à 316/81 et 83/82, EU:C:1982:430, point 14). Ce que l’avocat général n’avait pas manqué de le souligner (pt 92). Formulée à propos de l’exécution d’un arrêt en constatation de manquement, cette conclusion s’impose aussi à l’égard des juridictions ayant interrogé la Cour à titre préjudiciel, les arrêts en interprétation de la Cour s’imposant à toutes les juridictions. Cette interprétation précise la signification et la portée de la règle du droit de l’Union en cause telle qu’elle doit ou aurait dû être comprise et appliquée depuis le moment de sa mise en vigueur.

Dès 1982, dans l’arrêt de principe Cilfit (C-283/81)la Cour de justice a en effet encadré le jeu des doutes qui pourraient subsister dans l’esprit du juge national, mettant ainsi largement fin à la querelle de « l’acte clair ». Elle le rappelle ici dans son point 110 : « certes, une telle obligation n’incombe pas à cette juridiction lorsque celle-ci constate que la question soulevée n’est pas pertinente ou que la disposition du droit de l’Union en cause a déjà fait l’objet d’une interprétation de la part de la Cour ou que l’application correcte du droit de l’Union s’impose avec une telle évidence qu’elle ne laisse place à aucun doute raisonnable, l’existence d’une telle éventualité devant être évaluée en fonction des caractéristiques propres au droit de l’Union, des difficultés particulières que présente son interprétation et du risque de divergences de jurisprudence à l’intérieur de l’Union (voir, en ce sens, arrêts du 6 octobre 1982, Cilfit e.a., 283/81, EU:C:1982:335, point 21 ; du 9 septembre 2015, Ferreira da Silva e Brito e.a., C160/14, EU:C:2015:565, points 38 et 39, ainsi que du 28 juillet 2016, Association France Nature Environnement, C379/15, EU:C:2016:603, point 50).

La juridiction de dernier ressort qu’est le Conseil d’Etat devait donc s’interroger sur la portée de l’obligation pesant sur elle. La Cour de justice considère en effet qu’il résulte désormais « d’une jurisprudence consolidée depuis le prononcé de l’arrêt Cilfit e.a. qu’une juridiction dont les décisions ne sont pas susceptibles de faire l’objet d’un recours juridictionnel de droit interne est tenue, lorsqu’une question du droit de l’Union se pose devant elle, de déférer à son obligation de saisine, à moins qu’elle n’ait constaté que la question soulevée n’est pas pertinente [– c’est-à-dire “dans les cas où la réponse à cette question, quelle qu’elle soit, ne pourrait avoir aucune influence sur la solution du litige” –] ou que la disposition du droit de l’Union concernée a déjà fait l’objet d’une interprétation de la part de la Cour ou que l’application correcte du droit de l’Union s’impose avec une telle évidence qu’elle ne laisse place à aucun doute raisonnable» (CJUE, 9 septembre 2015, Ferreira da Silva e Brito, C160/14, EU:C:2015:565, pt 38). Pertinence et évidence de la question soulevée permettaient-elles alors de se soustraire à un nouveau renvoi en direction de Luxembourg ?

De l’avis de Melchior Wathelet, « le Conseil d’État ne s’était pas mépris sur le sens et la portée de l’arrêt du 15 septembre 2011, Accor (C‑310/09), en ce qui concerne le régime probatoire autorisé et l’évaluation du montant de précompte à rembourser. Aucun manquement à l’obligation de renvoi préjudiciel ne peut lui être reproché à ce propos » (pt 95). Si la jurisprudence Cilfit était ici pertinente, il était plus délicat de l’invoquer à propos de l’impôt acquitté par les sous-filiales : « en choisissant de s’écarter de cet arrêt au seul motif que le régime britannique était différent du régime français de l’avoir fiscal et du précompte, le Conseil d’État ne pouvait être certain que son raisonnement s’imposerait avec la même évidence à la Cour » (pt 99). L’avocat général avait donc eu beau jeu de souligner « la divergence des solutions proposées par les sociétés requérantes et le rapporteur public démontrait d’ailleurs l’absence de certitude sur la solution à retenir ». Dès lors, « l’évidence » exigée par les critères de la jurisprudence Cilfit semblait donc sujette à caution puisqu’elle n’était pas partagée.

La  Cour confirme cette analyse, sans juger utile d’aller plus loin : « le Conseil d’État a choisi de s’écarter de l’arrêt du 13 novembre 2012, Test Claimants in the FII Group Litigation (C35/11, EU:C:2012:707), au motif que le régime britannique en cause était différent du régime français de l’avoir fiscal et du précompte, alors qu’il ne pouvait être certain que son raisonnement s’imposerait avec la même évidence à la Cour » (pt 111). D’autant que, en refusant le renvoi préjudiciel dans ses arrêts de 2012, il a été conduit à adopter « une solution fondée sur une interprétation des dispositions des articles 49 et 63 TFUE qui est en contradiction avec celle retenue dans le présent arrêt, ce qui implique que l’existence d’un doute raisonnable quant à cette interprétation ne pouvait être exclue au moment où le Conseil d’État a statué » (pt 112).

Le reproche de la Cour de justice est donc fondé : « en n’interrogeant pas la Cour, le Conseil d’État a créé un risque de divergences de jurisprudence au sein de l’Union incompatible avec l’obligation de renvoi préjudiciel qui pesait sur lui, en tant que juridiction dont les décisions ne sont pas susceptibles de recours, au titre de l’article 267, troisième alinéa, TFUE » (pt 113).

Cette condamnation sans ambiguïté laisse alors aux contribuables la possibilité, non pas de demander la révision de la décision définitive du Conseil d’Etat de 2011, qui a autorité de la chose jugée, mais de demander réparation du préjudice fiscal subi. Cela est régulièrement rappelé par la Cour, comme par exemple dans l’arrêt Köbler précité: « il découle des exigences inhérentes à la protection des droits des particuliers qui se prévalent du droit communautaire qu’ils doivent avoir la possibilité d’obtenir devant une juridiction nationale réparation du préjudice causé par la violation de ces droits du fait d’une décision d’une juridiction statuant en dernier ressort ». Faute d’avoir respecté le droit de l’Union, dans sa double obligation procédurale et matérielle, le Conseil d’Etat engage donc la responsabilité de la France. En effet, un manquement d’un État membre peut être, en principe, constaté au titre de l’article 258 TFUE quel que soit l’organe de cet État dont l’action ou l’inaction est à l’origine du manquement, même s’il s’agit d’une institution constitutionnellement indépendante (CJCE, 9 décembre 2003, Commission/Italie, C‑129/00, EU:C:2003:656, pt 29 ; CJUE, 12 novembre 2009, Commission/Espagne, C‑154/08, non publié, EU:C:2009:695, pt 125).

Il reste donc pour les requérants, Accor et Rhodia, à saisir le juge administratif d’une action en réparation du préjudice subi…en raison d’une faute de la Cour suprême du même ordre. Si, d’aventure, les magistrats administratifs ne leur accordaient pas réparation, la CEDH, et plus particulièrement son article 41, permet à la Cour européenne des droits de l’homme de condamner un État ayant violé un droit fondamental à compenser les dommages qui ont résulté de ce comportement pour la personne lésée. Une telle compensation peut être également accordée lorsque la violation résulte du contenu d’une décision d’une juridiction nationale statuant en dernier ressort (voir Cour eur. D. H., arrêt du 21 mars 2000, Dulaurans c. France).

On se souvient qu’à l’occasion de son départ à la retraite, l’ancien vice-président du Conseil d’Etat, Jean-Marc Sauvé évoquait justement la « mise en cohérence » de la jurisprudence du Conseil d’Etat avec celle de la Cour de justice, faisant ainsi valoir que « (sa) vice-présidence a marqué la fin des divergences qui nous isolaient sur la scène européenne. Le Conseil d’Etat est revenu au centre du jeu » (« La société est divisée, voire fracturée », Le Monde, 29-30 avril 2018).

La tension que l’on croyait disparue demeure donc bien présente et elle s’inscrit dans un mouvement général que le droit de l’ELSJ révèle, sous d’autres latitudes aussi. La Cour de justice utilise en l’espèce le paravent technique du droit fiscal pour tenter de la réduire par ce rappel à l’ordre. Elle apporte la preuve que le souhait de ne pas cantonner le rôle de la juridiction suprême à « l’interprétation de l’évidence » (JD Combrexelle, Sur l’actualité du dialogue des juges, AJDA 15 octobre 2018) trouve sa limite dans l’architecture juridictionnelle de l’Union. Le dialogue tant de fois vanté au Palais Royal se réduira-t-il alors à un monologue un peu suffisant ?