Le contentieux de la 2ème génération en matière de coopération judiciaire civile : le cas “Goldbet Sportwetten”

Par Cyril Nourissat, EDIEC 

L’arrêt Goldbet Sportwetten GmbH (CJUE, 13 juin 2013, Goldbet Sportwetten GmbH, C-144/12) confirme l’existence progressive de ce que nous appelons un contentieux de la 2ème génération en matière de coopération judiciaire civile.

Si, depuis plus de 10 ans, la Cour de justice est régulièrement interrogée à titre préjudiciel en interprétation de tel ou tel règlement édicté au titre du volet civil de l’espace de liberté, de sécurité et de justice, plus rares sont les arrêts où elle est amenée à répondre à des questions tenant à l’articulation de ces règlements les uns avec les autres, dessinant ainsi par touches successives le substrat de cet espace judiciaire civil européen en construction.

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Working paper n° 4 – Le règlement “Bruxelles I Bis” au regard de la future adhésion de l’UE à la CESDHLF

Par Jean-Sylvestre Bergé (EDIEC)

Le thème de cette contribution (WP n° 4 _ Le règlement “Bruxelles I Bis” au regard de la future adhésion de l’UE à la CESDHLF) s’inscrit dans la double perspective de l’entrée en vigueur du Règlement dit de « Bruxelles 1 Bis » et de l’adhésion décidée mais non encore finalisée de l’Union européenne (UE) à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (CESDHLF).

Il a pour toile de fond la confrontation du droit au procès équitable et des mécanismes de droit international privé destinés à régler les questions de compétence des juridictions nationales et les modalités de reconnaissance et d’exécution (exequatur) des décisions étrangères. Lire la suite

Deux renvois préjudiciels concernant l’interprétation de l’article 5, point 3 du Règlement « Bruxelles I »

par Romuald Di Noto, CEDI

La Cour fédérale de justice allemande (Bundesgerichtshof) a récemment transmis à la Cour de Justice de l’Union européenne (CJUE) deux questions préjudicielles portant sur l’interprétation de l’article 5, point 3 du Règlement n°44/2001 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale (Règlement « Bruxelles I »).

Cette disposition prévoit qu’en matière délictuelle ou quasi-délictuelle, « une personne domiciliée sur le territoire d’un Etat membre peut être attraite, dans un autre Etat membre (…), devant le tribunal du lieu où le fait dommageable s’est produit ou risque de se produire ». La notion de lieu de survenance du fait dommageable est interprété par la jurisprudence en ce sens que ce lieu est soit le lieu où le dommage est survenu, soit celui où l’événement causal s’est produit (CJCE, 30 novembre 1976, Mines de Potasse d’Alsace, Rec. CJCE, p. 1735, concl. CAPOTORTI). Lorsque ces deux lieux sont dissociés, le demandeur dispose d’une option de compétence.

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Confirmation de la protection du consommateur actif par les règles de compétence spéciale issues du Règlement n° 44/2001

par Blandine de Clavière, EDIEC

L’histoire de la quatrième section de la convention de Bruxelles, puis du règlement Bruxelles I, démontre qu’une distinction de plus en plus limpide se dessine entre l’objectif de protection du consommateur et la localisation de la situation, à la faveur du premier. Cette dynamique vaut pour la détermination des éléments de rattachement. Elle s’étend également aux critères d’applicabilité des règles de conflit.

L’arrêt Mühlleitner, rendu par la Cour de justice de l’Union le 6 septembre dernier, s’inscrit dans ce mouvement (CJUE, 6 septembre 2012, Aff. C-190/11, Daniela Mühlleitner c. Ahmad Yusufi et Wadat Yusufi). Une nouvelle fois soumise à l’interprétation de l’article 15, § 1, sous c), du règlement 44/2001, la Cour précise les conditions d’applicabilité de cette disposition, pour affirmer que son champ d’application ne saurait être limité aux seuls contrats de consommation conclus à distance : la condition essentielle à laquelle est subordonnée la mise en œuvre de l’article 15, § 1, sous c), est celle liée à l’activité commerciale ou professionnelle dirigée vers l’État du domicile du consommateur. Lire la suite

Les petits pas de la justice civile transfrontière européenne : l’exemple de la propriété intellectuelle

par Jean-Sylvestre Bergé, EDIEC

La Cour de justice a rendu un arrêt attendu par les spécialistes de contentieux international de la propriété intellectuelle (CJUE, 25 oct. 2012, Fisher, C-133/11).

Elle a considéré, en effet, que « L’article 5, point 3, du règlement (CE) n° 44/2001 du Conseil, du 22 décembre 2000, concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale, doit être interprété en ce sens qu’une action en constatation négative visant à faire établir l’absence de responsabilité délictuelle ou quasi délictuelle relève du champ d’application de cette disposition ».

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Conseil des ministres JAI des 7 et 8 juin 2012 – Quel bilan pour la coopération judiciaire en matière civile ?

par Claire Debourg, Laurence Sinopoli et Marjolaine Roccati, CEJEC

Si les conclusions du Conseil des ministres JAI les 7 et 8 juin 2012 révèlent les préoccupations migratoires des différents États membres (voir le mot de MM. Labayle et Bergé), la coopération judiciaire en matière civile n’a pas pour autant été absente des débats.
Ce Conseil a ainsi notamment permis l’adoption du règlement relatif à la compétence, à la loi applicable, à la reconnaissance et à l’exécution des décisions et des actes authentiques en matière de successions et à la création d’un certificat successoral européen ainsi que l’adoption d’une « orientation générale » règlement concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale (le règlement « Bruxelles I »).

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Vers une spécialisation de la notion de “résidence habituelle” : les précisions du nouveau règlement “Successions”

par M. Da Lozzo, IRDEIC

A partir du 17 août 2015 sera applicable le Règlement n° 650/2012 du Parlement Européen et du Conseil du 4 juillet 2012 relatif à la compétence, la loi applicable, la reconnaissance et l’exécution des décisions, et l’acceptation et l’exécution des actes authentiques en matière de successions et à la création d’un certificat successoral européen (Règlement « Successions »). Parmi les nouveautés, il faut noter la suppression dans la plupart des cas de la scission française en matière de successions transfrontalières. De plus, les critères de rattachement retenus sont limités à deux aussi bien pour la compétence internationale que pour la loi applicable.

La résidence habituelle du de cujus au moment de son décès est l’élément de rattachement de principe du Règlement Successions (art. 4 et 21.1). La nationalité du défunt, critère subsidiaire, ouvre la voie à la professio juris (art. 22). Lire la suite

La proposition de règlement instaurant un droit commun de la vente : une simplification avortée en matière de clauses de juridiction ?

par Marie Collard, IRDEIC

La proposition de Règlement instaurant un droit commun européen de la vente (COM (2011) 635) a suscité nombre de commentaires, axés d’une part sur l’aspect innovant et d’autre part sur les solutions moins protectionnistes du consommateur que peuvent l’être certains droits nationaux (B. Fauvarque-Cosson, «Vers un droit commun européen de la vente », Recueil Dalloz 2012 p. 34 ; G. Paisant, « La proposition d’un droit commun de la vente ou l’esperanto contractuel de la Commission européenne », Semaine juridique édition générale, n° 18, avr. 2012, p. 560 ; C. Aubert de Vincelles, « Premiers regards sur la proposition d’un droit commun européen de la vente », Semaine juridique Entreprise et Affaire, n° 51, déc. 2011, act. 683. ).

Quasi exclusivement relative à la loi applicable, la proposition vise néanmoins les clauses de juridiction, appelant un regard spécifique sur ce point. Lire la suite

Conflits de compétence et exécution d’un mandat d’arrêt européen dans l’affaire Toscan Du Plantier : quelle cohérence pour l’espace pénal européen ?

par Guillemine Taupiac- Nouvel, IRDEIC

L’arrêt rendu le 1er mars 2012 par la Cour suprême de la République d’Irlande met en lumière la délicate application d’un instrument de coopération judiciaire pénale nouvellement fondée sur le principe de reconnaissance mutuelle entre les Etats de l’Union européenne. La décision  prise à l’unanimité des cinq juges de la Supreme court de refuser d’exécuter un mandat d’arrêt européen (MAE) émis par la France ne surprend pas en soi.

Plus inattendues, en revanche, sont les raisons qui justifient ce refus. Le raisonnement des plus hauts magistrats irlandais, et le travail d’exégèse des textes européen et national qui le sert, renvoient à la question de la cohérence de l’espace pénal européen. Lire la suite